Emmanuel Macron a reçu, jeudi 28 juillet 2022, le prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salmane, pour un dîner de travail, à l'Élysée. La réception a été très critiquée par les associations de défense des droits de l'homme et des responsables politiques, notamment l'opposition de gauche.

Mohammed Ben Salmane est notamment accusé d'avoir ordonné l'assassinat du journaliste saoudien, Jamal Khashoggi, en Turquie, en 2018. Mais, qu'importe, Emmanuel Macron applique sans vergogne une vieille doctrine française, celle d'une diplomatie au service de l'argent et du pétrole, quitte à fermer les yeux sur les pratiques douteuses de ses alliés.

Le président français a d'ailleurs longuement serré la main du prince héritier saoudien, jeudi, qui, en retour, a salué un peu trop chaleureusement son hôte. Vêtu de la tenue traditionnelle saoudienne, c'est sa première visite en Europe depuis la mort de notre confrère saoudien. Un meurtre, dont les services de renseignement américains, estiment que le prince héritier saoudien est responsable.

Il y a deux semaines, déjà, la visite du président américain Joe Biden en Arabie saoudite avait fait couler beaucoup d'encre, en forme de retour au premier plan sur la scène internationale, dans un contexte de guerre en Ukraine et de flambée des prix de l'énergie.

"Du pétrole et des armes"

C'est d'ailleurs sur ce dernier point que Paris tente de préserver ses relations et ses intérêts avec Ryad. L'Elysée confirme, jeudi, que ce dîner était nécessaire, notamment face à l'envolée des prix, mais aussi aux inquiétudes autour du programme nucléaire iranien, et pour lutter contre la crise alimentaire dans de nombreux pays, notamment au Yémen.

Dans un message sur les réseaux sociaux, l’ancien candidat écologiste à la présidentielle, Yannick Jadot, a dénoncé la visite à l’Elysée du prince héritier saoudien, en affirmant : "Au menu du dîner entre Emmanuel Macron et MBS le corps démembré du journaliste Khashoggi ? Le chaos climatique ? La paix et les droits humains ? Le jour du dépassement ? Non ! Du pétrole et des armes ! L’exact opposé de ce qu’il faut faire !".

Les ONG, elles, accusent Paris de faire passer le pétrole avant les droits de l'Homme. La présidence française affirme qu'Emmanuel Macron a abordé cette question avec Mohammed Ben Salmane. En revanche, pas de communiqué de l'Elysée, ni de communication officielle des services de la présidence au sortir de cette entrevue.

Une plainte contre "MBS"

Rien non plus sur le Yémen, alors que le pays tente d'obtenir un accord de paix depuis un cessez le feu en avril, après sept ans d'une guerre menée par l'Arabie Saoudite et une coalition de pays alliés. Sur place, la situation humanitaire se détériore et menace 17 millions de Yéménites, selon le Conseil de sécurité de l'ONU.

C'est dans ce contexte que deux ONG annoncent un dépôt de plainte pour "complicité de torture et disparition forcée" de notre confrère saoudien. Elle a été déposée jeudi auprès du doyen des juges d'instruction du tribunal judiciaire de Paris, selon un des avocat des deux ONG, cité par l'AFP.

Hatice Cengiz, la fiancée turque de Jamal Khashoggi, affirme être "scandalisée" et "outrée" de voir le commanditaire de l'assassinat de son ancien compagnon reçu en grande pompe à l’Élysée. "C’est une honte !", dit-elle.